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DE LA SICILE.

sède, disait-il ; mais elle ne me possède pas. » Démosthène marchanda ses faveurs. Le prix de dix mille drachmes effraya cet orateur célèbre : « Je n’achète pas si cher un repentir », répondit-il. Laïs, aimée par Diogène le cynique, avait raison de ne pas croire à l’austérité des philosophes. « Malgré ce beau nom, disait-elle, ils n’en sont pas moins à ma porte comme tous les autres. » La difficulté d’être admis dans sa cour nombreuse et brillante fit naître ce proverbe : Non cujusvis hominis est adire Corinthum. Éprise d’un jeune Thessalien, Laïs le suivit dans sa patrie : elle y fut victime de la vengeance des femmes thessaliennes, jalouses de sa beauté, quoiqu’elle eût cinquante ans ; ces femmes furieuses l’assassinèrent dans le temple de Vénus. Athénée, dans son XIII.e livre, fait le portrait le plus séduisant de l’éclatante beauté de Laïs ; il assure que sa taille et sa gorge étaient d’une si admirable perfection, que les peintres et les statuaires sollicitaient de toutes parts la faveur de copier ce gracieux modèle. Quelques auteurs prétendent que l’on voyait son tombeau à Corinthe, entre le temple de Bellérophon et celui de Vénus Mélanide ; d’autres assurent qu’il se