Page:Fournier - Mon encrier (recueil posthume d'études et d'articles choisis dont deux inédits), Tome II, 1922.djvu/140

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toujours et à tout propos il trouve moyen de lui reprocher brutalement son incroyance.

— Nous autres, Canadiens-Français, nous sommes des catholiques… La Libre-Pensée nous répugne. Quoi que disent vos compatriotes, nous préférerons toujours, pour notre part, le Christ à votre Voltaire. Et cœtera.

Tout lui est prétexte à de telles réflexions. Que la malheureuse lui parle du charme des paysages, de la poésie des monuments, de l’agrément des promenades ou simplement du temps qu’il fait, vlan ! il faut qu’il lui réponde par un sermon. Et quel sermon !

Dès leur première rencontre à Québec, Marguerite Delorme se croit tenue de faire compliment à notre Canadien sur la beauté de son pays :

Hier soir, dit-elle, au Château Frontenac, assise à la fenêtre de ma chambre qui regardait le Saint-Laurent, rouge de flammes, j’ai reçu le coup de foudre… Décidément, je suis amoureuse !… (P. 68-69.)

Un autre, vous, moi, enfin un Canadien ordinaire, un catholique dans la moyenne, aurait répondu par un mot aimable à cette aimable parole. Lui, écoutez-le :

Selon votre idéal de l’amour libre (sic), je suppose, dit Jules, avec un sourire. Quand il vous plaira de rompre vos amours, vous nous quitterez… (P. 69.)

Discrètement, la jeune fille s’efforce d’entraîner son interlocuteur sur un terrain moins brûlant… — Voyez donc, dit-elle, le joli paysage !