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Des régions de l’Ourse aux plages d’Orion,
Baignant le steppe aride et les bosquets d’orange,
Et mariant ainsi dans un hymen étrange
L’Équateur au Septentrion.

Fier de sa liberté, fier de ses flots sans nombre,
Fier des grands bois mouvants qui lui versent leur ombre,
Le Roi-des-Eaux n’avait encore, en aucun lieu
Où l’avait promené sa course vagabonde,
Déposé le tribut de sa vague profonde,
Que devant le soleil et Dieu !…

Jolliet ! Jolliet ! quel spectacle féerique
Dut frapper ton regard, quand ta nef historique
Bondit sur les flots d’or du grand fleuve inconnu !
Quel sourire d’orgueil dut effleurer ta lèvre !
Quel éclair triomphant, à cet instant de fièvre,
Dut resplendir sur ton front nu !
 
Le voyez—vous, là-bas, debout comme un prophète,
L’œil tout illuminé d’audace satisfaite,