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Mais sur ces hauteurs même, au midi de la chaîne,
Nous voyons des étangs[1] de qui l’onde incertaine
Va grossir la Moselle et la Saône à la fois ;
On peut dans les deux mers les verser, à son choix.
À tous les grands desseins Rome attachant sa gloire,
Ici, d’un projet vaste, offre encor la mémoire.
Ces eaux durent jadis, par leur double penchant,
Lier les mers du nord à celles du couchant.
Ainsi donc, l’Océan, la Méditérannée
Devaient s’unir, au pié de la Vôge étonnée.
Ô Lucius Velus ![2] quel honneur pour ton nom !
Tu conçus ce projet ; mais c’était sous Néron.
Ah ! l’on ne sait que trop que, sous la tyrannie,
Il faut voiler son ame, étouffer son génie,
Éteindre sa pensée, immoler à la peur
Jusques au bien public, passion d’un grand cœur.
L’histoire t’a vengé. De ta belle entreprise
Le récit, dans Tacite, au moins t’immortalise.
Mais est-ce donc pour nous assez de t’admirer ?
Ce n’est qu’en t’imitant qu’on pourrait t’honorer.
La fortune à mes vœux ravit cet avantage.
Je ne reçus du ciel que ma lyre en partage ;
Mais si mes faibles sons pouvaient être entendus,
Tes soins pour mon pays ne seraient pas perdus.

Au couchant, on voit naître et se perdre la Meuse.[3]

    Bernard, le St. Gothard, &c. &c. Vers les quatre points cardinaux, la vue est presque aussi frappante. Celle du nord, la plus bornée, s’étend au moins à 15 lieues.

  1. L’étang de Cône, des sources à Saint Balmont et sur d’autres plateaux.
  2. Voyez la note * à la suite du Poëme.
  3. La Meuse arrivée à Basoilles, à une lieue de Neufchâteau, disparaît tout d’un coup, et se remontre en-