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GUIDE DU BON SENS

du chêne, la citrouille, dont c’est la place normale, plutôt que le gland.

Pourquoi cependant la nature, qui sait mieux que personne ce qui est normal, qui le sait par définition, assigne-t-elle, en définitive, au gland la place normale de la citrouille ?

C’est en prévision de l’homme qui n’est pas, mais peut être éventuellement partie au débat, de l’homme qui, à première vue, n’a rien à démêler du gland, de la citrouille et du chêne, mais qui le jour où il viendrait s’allonger sous le chêne, moins dangereusement qu’une citrouille courrait le risque de recevoir un gland sur le nez…

On fait volontiers honneur à « M. Tout-le-Monde » d’avoir plus d’esprit que M. de Voltaire ; on se trompe, c’est plus de bon sens qu’il faudrait dire : l’esprit est individuel, tandis que, ce qui appartient à la communauté, c’est le bon sens.

Sans bon sens, pas de société bien ordonnée, alors que tel individu, éminent par l’esprit, vivra en marge de la société et ne lui procurera aucun avantage substantiel.

L’un n’exclut pas l’autre, mais la société a moins besoin d’hommes d’esprit que d’hommes de bon sens.

Les manifestations du bon sens sont toujours, par quelque côté, des manifestations sociales, et, quand le bon sens agit ou conseille,