Page:Freud - Introduction à la psychanalyse (trad. Jankélévitch), 1923.djvu/315

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très variées, raffinées, souvent difficiles à reconnaître. Cela s’appelle se méfier du médecin et se mettre en garde contre lui. Nous appliquons, dans la thérapeutique psychanalytique, la technique que vous connaissez déjà pour m’avoir vu l’appliquer à l’interprétation des rêves. Nous invitons le malade à se mettre dans un état d’auto-observation, sans arrière-pensée, et à nous faire part de toutes les perceptions internes qu’il fera ainsi, et dans l’ordre même où il les fera : sentiments, idées, souvenirs. Nous lui enjoignons expressément de ne céder à aucun motif qui pourrait lui dicter un choix ou une exclusion de certaines perceptions, soit parce qu’elles sont trop désagréables ou trop indiscrètes, ou trop peu importantes ou trop absurdes pour qu’on en parle. Nous lui disons bien de ne s’en tenir qu’à la surface de sa conscience, d’écarter toute critique, quelle qu’elle soit, dirigée contre ce qu’il trouve, et nous l’assurons que le succès et, surtout, la durée du traitement dépendent de la fidélité avec laquelle il se conformera à cette règle fondamentale de l’analyse. Nous savons déjà, par les résultats obtenus grâce à cette technique dans l’interprétation des rêves, que ce sont précisément les idées et souvenirs qui soulèvent le plus de doutes et d’objections qui renferment généralement les matériaux les plus susceptibles de nous aider à découvrir l’inconscient.

Le premier résultat que nous obtenons en formulant cette règle fondamentale de notre technique consiste à dresser contre elle la résistance du malade. Celui-ci cherche à se soustraire à ses commandements par tous les moyens possibles. Il prétend tantôt ne percevoir aucune idée, aucun sentiment ou souvenir, tantôt en percevoir tant qu’il lui est impossible de les saisir et de s’orienter. Nous constatons alors, avec un étonnement qui n’a rien d’agréable, qu’il cède à telle ou telle autre objection critique ; il se trahit notamment par les pauses prolongées dont il coupe ses discours. Il finit par convenir qu’il sait des choses qu’il ne peut pas dire, qu’il a honte d’avouer, et il obéit à ce motif, contrairement à sa promesse. Ou bien il avoue avoir trouvé quelque chose, mais que cela regarde une tierce personne et ne peut pour cette raison être divulgué. Ou encore, ce qu’il a trouvé est vraiment trop insignifiant, stupide ou absurde