Page:Freud - Introduction à la psychanalyse (trad. Jankélévitch), 1923.djvu/344

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vous ne voulez pas croire, je vous renvoie aux résultats de l’analyse et de l’observation directe des enfants, et je vous dis qu’il faut de la mauvaise volonté pour ne pas voir ces choses ou pour les voir autrement. Je ne vois aucun inconvénient à ce que vous trouviez étonnante l’affinité que je postule entre l’activité sexuelle infantile et les perversions sexuelles. Il s’agit pourtant là d’une relation tout à fait naturelle, car si l’enfant possède une vie sexuelle, celle-ci ne peut être que de nature perverse, attendu que, sauf quelques vagues indications, il lui manque tout ce qui fait de la sexualité une fonction de procréation. Ce qui caractérise, d’autre part, toutes les perversions, c’est qu’elles méconnaissent le but essentiel de la sexualité, c’est-à-dire la procréation. Nous qualifions en effet de perverse toute activité sexuelle qui, ayant renoncé à la procréation, recherche le plaisir comme un but indépendant de celle-ci. Vous comprenez ainsi que la ligne de rupture et le tournant du développement de la vie sexuelle doivent être cherchés dans sa subordination aux fins de la procréation. Tout ce qui se produit avant ce tournant, tout ce qui s’y soustrait, tout ce qui sert uniquement à procurer de la jouissance, reçoit la dénomination peu recommandable de « pervers » et est, comme tel, voué au mépris.

Laissez-moi, en conséquence, poursuivre mon rapide exposé de la sexualité infantile. Tout ce que j’ai dit concernant deux systèmes d’organes pourrait être complété en tenant compte des autres. La vie sexuelle de l’enfant comporte une série de tendances partielles s’exerçant indépendamment les unes des autres et utilisant, en vue de la jouissance, soit le corps même de l’enfant, soit des objets extérieurs. Parmi les organes sur lesquels s’exerce l’activité sexuelle de l’enfant, les organes sexuels ne tardent pas à prendre la première place ; il est des personnes qui, depuis l’onanisme inconscient de leur première enfance jusqu’à l’onanisme forcé de leur puberté, n’ont jamais connu d’autre source de jouissance que leurs propres organes génitaux, et chez quelques-uns même cette situation persiste bien au-delà de la puberté. L’onanisme n’est d’ailleurs pas un de ces sujets dont on vient facilement à bout ; il y a là matière à de multiples considérations.