Page:Freud - Introduction à la psychanalyse (trad. Jankélévitch), 1923.djvu/412

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de vue du refoulement, nous sommes prévenus de n’avoir pas à prendre pour juge l’un des deux adversaires en conflit, surtout pas l’adversaire victorieux. Nous savons désormais que tout ce que le moi pourrait nous dire serait de nature à nous induire en erreur. On pourrait encore accorder confiance au moi si on le savait actif dans toutes ses manifestations, si on savait qu’il a lui-même voulu et produit ses symptômes. Mais dans un grand nombre de ses manifestations, le moi reste passif, et c’est cette passivité qu’il cherche à cacher et à présenter sous un aspect qui ne lui appartient pas. D’ailleurs, le moi n’ose pas toujours se soumettre à cet essai, et il est obligé de convenir que, dans les symptômes de la névrose obsessionnelle, il sent se dresser contre lui des forces étrangères dont il ne peut se défendre que péniblement.

Ceux qui, sans se laisser décourager par ces avertissements, prennent les fausses indications du moi pour des espèces sonnantes, auront certainement beau jeu et échapperont à tous les obstacles qui s’opposent à l’interprétation psychanalytique de l’inconscient, de la sexualité et de la passivité du moi. Ceux-là pourront affirmer, comme le fait Alfred Adler, que c’est le « caractère nerveux » qui est la cause de la névrose, au lieu d’en être l’effet, mais ils seront aussi incapables d’expliquer le moindre détail de la formation de symptômes ou le rêve le plus insignifiant.

Vous allez me demander : « Ne serait-il donc pas possible de tenir compte de la part qui revient au moi dans la nervosité et la formation de symptômes, sans négliger d’une façon trop flagrante les facteurs découverts par la psychanalyse ? » À quoi je réponds : « La chose doit certainement être possible, et cela se fera bien un jour, mais vu l’orientation suivie par la psychanalyse, ce n’est pas par ce travail qu’elle doit commencer. » On peut prédire le moment où cette tâche viendra s’imposer à la psychanalyse. Il y a des névroses dans lesquelles la part du moi se manifeste d’une façon beaucoup plus intensive que dans celles que nous avons étudiées jusqu’à présent : nous appelons ces névroses « narcissiques ». L’examen analytique de ces affections nous permettra de déterminer avec certitude et impartialité la participation du moi aux affections névrotiques.