Page:Froissart - Méliador, tome 1.djvu/335

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
255
Méliador

Si s’encontrent cil chevalier
Et se fierent, sus les escus,
Des lances as bons fers agus,
Par une si fiere ordenance
8850 Que cescuns des chevaus s’estance.
Contre les cops, qui sont pesant
Et fort encontré, en boutant,
Les lances ne sont point rompues, f. 65 c
Ne les targes ossi fendues ;
8855 Oultre s’en passent sans cheïr.
Mais qu’il ne leur puist mescheïr,
Encores feront une jouste,
Car li bien jouster leur agouste :
Il reprendent rens et conrois.
8860 Melyador fu lons, et drois
Et bien enfourciés en la selle ;
Si arreste desous l’asselle
Sa lance qui fu bonne et roide,
A une pointe agüe et froide.
8865 Messires Camelz, d’autre part,
En tel point de son tour se part,
Felenés et mautalentis
De ce que ja n’est desconfis
Ses campïons au premier cop :
8870 Il ne le doubtoit pas dont trop.
Cescuns son cheval esporonne
Et s’en viennent a l’eure bonne,
L’un sus l’autre, par grant aïr.
Au droit se peurent consieuir
8875 Droit en mi lieu de leurs escus.
De ce cop fuissent porté jus,
Se les lances qui sont prisies
Ne fuissent en tronçons brisies ;
Mais, pour ce qu’elles tronçonnèrent,
8880 Sus leurs estriers estançonnerent.
Oultre passerent radement.