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De la composition de Méliador

âge finissant, Froissart aime à parer les personnages créés par lui de noms sonores. Ce n’est pas assez pour lui d’emprunter Sagremor aux poèmes de la Table Ronde, il lui faut aussi Agamanor, Aganor, Albanor, Dagor, Lucanor, et il trouve que celui qui les surpasse tous en valeur ne doit pas avoir un nom moins brillant. Il était facile de substituer à la finale du nom de Mériadoc cette terminaison -or qui plaisait tant aux hommes du xive siècle ; mais « Mériador » parut sans doute un peu rude au curé d’Estinnes et il en fit Méliador[1].


Nous n’essayerons pas d’opérer le départ entre les emprunts que Froissart a pu faire à des sources diverses et ce qui est complètement le produit de son imagination. Ce ne serait pas d’ailleurs une tâche facile ; mais cette tâche pourra tenter un jour quelqu’un des lecteurs du poème que nous mettons au jour. Les quelques observations qu’il nous a été donné de faire dans cet ordre d’idées, en dehors de ce qu’on vient de lire au sujet de la ville de Signandon et du personnage de Méliador, auront leur place naturelle dans la Table des noms propres

  1. M. Emmanuel Philipot a récemment exprimé une opinion analogue dans un travail intitulé Un Épisode d’Erec et Enide : « Les suffixes celtiques -oc, -uc, -uec, -euc, -awc, dit-il, ont été très souvent remplacés par des suffixes de tournure moins exotique et plus faciles à entrer dans le vers… On sait que le nom de Méliador, titre d’un roman de Froissart, provient de Mériadoc, Meriadeuc. Nous trouvons également Cador = Cadoc. » (Romania, t. XXV, p. 286, note 2).