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DE JEAN FROISSART.

Le doulc penser qui les broquetes porte ;
En quoi le vrai amant moult se deporte.
Il y en a jusques à vint et quatre.
Quant Souvenirs y fait l’amant embatre,
Joie et confort son espérance doublent,
Ne nul soussi ne anoi ne le tourblent ;
Ains fait ses chans d’ordenance amoureuse ;
Car tant li est sa pensée joieuse
Pour les vertus qui sont de noble afaire,
Que cils pensers li poet moult de biens faire ;
Dont Souvenir li donne ramembrance,
Car lors cognoist ses fès de branche en branche,
Et li remet par usage au devant
Ce qui li est plaisant et avenant ;
Et se li fait aussi ramentevoir
Que en amer le pot primiers mouvoir.
Lors la beauté de sa dame figure,
Son sens, son bien, et sa deuce figure ;
En ce desir amoureus persevere
Et nuit et jour liement considere
De sa vie l’estat trestout entir.
Neis, se d’amer se voloit repentir,
Se ne poet-il, car Souvenir le point ;
Qui li remet sa besongne en bon point ;
Desir, premiers, Beauté, et puis Plaisance,
Secondement Paour et Attemprance,
Et aussi Pour-véance sans moyen,
Et Doulc-Penser qui li fait moult de bien.
Et les vertus qui ci dessus sont dittes
Par Souvenir sont en son coer escriptes,