Page:Fromentin - Dominique, 1863.djvu/183

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Les préliminaires furent très-longs, et je comptais les minutes qui me séparaient encore du moment de ma délivrance. Enfin le signal se fit entendre. À titre de lauréat de philosophie, mon nom fut appelé le premier. Je montai sur l’estrade ; et quand j’eus ma couronne d’un main, mon gros livre de l’autre, debout au bord des marches, faisant face à l’assemblée qui applaudissait, je cherchai des yeux Mme Ceyssac : le premier regard que je rencontrai avec celui de ma tante, le premier visage ami que je reconnus précisément au-dessous de moi, au premier rang, fut celui de Mme de Nièvres. Éprouva-t-elle un peu de confusion elle-même en me voyant là dans l’attitude affreusement gauche que j’essaye de vous peindre ? Eut-elle un contre-coup du saisissement qui m’envahit ? Son amitié souffrit-elle en me trouvant risible, ou seulement en devinant que je pouvais souffrir ? Quels furent au juste ses sentiments pendant cette rapide mais très-cuisante épreuve, qui sembla nous atteindre tous les deux à la fois et presque dans le même sens ? je l’ignore ; mais elle devint très-rouge, elle le devint encore davantage quand elle me vit descendre et m’approcher d’elle. Et quand ma tante, après m’avoir embrassé, lui passa ma couronne en l’invitant à me féliciter,