Page:Fromentin - Dominique, 1863.djvu/323

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en la voyant ainsi égarée et comme aventurée dans une partie de Paris qui devait être le bout du monde pour Mme de Nièvres.

« Je vais à deux pas d’ici, me répondit-elle avec un peu d’embarras, faire une visite. »

Elle me nomma la personne chez qui elle allait.

« Que je sois reçue ou non, reprit-elle aussitôt, séparons-nous. Il est bon qu’on ne nous voie pas ensemble. Il n’y a plus rien d’innocent dans vos démarches. Vous avez fait de telles folies que désormais c’est à moi d’être prudente.

— Je vous quitte, lui dis-je en la saluant.

— À propos, reprit Madeleine au moment où je m’éloignais, je vais ce soir au théâtre avec mon père et ma sœur : il y a une place pour vous, si vous la voulez.

— Permettez…, lui dis-je en ayant l’air de réfléchir à des engagements que je n’avais pas, ce soir je ne suis pas libre.

— J’avais pensé…, ajouta-t-elle avec la douceur d’un enfant pris en faute, j’espérais…

— Cela me serait tout à fait impossible, » répondis-je avec un sang-froid cruel.

On eût dit que je prenais plaisir à lui rendre caprice pour caprice et à la torturer.

Le soir, à huit heures et demie, j’entrais dans sa