Page:Fromentin - Dominique, 1863.djvu/370

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

un mot plus doux qu’elle ne disait pas. Un dernier retour de faiblesse ou de pitié le lui arracha.

« Mon pauvre ami ! me dit-elle ; il fallait en venir là. Si vous saviez combien je vous aime ! Je ne vous l’aurais pas dit hier ; aujourd’hui cela peut s’avouer, puisque c’est le mot défendu qui nous sépare. »

Elle, exténuée tout à l’heure, elle avait retrouvé par miracle je ne sais quelle ressource de vertu qui la raffermissait à mesure. Je n’en avais plus aucune.

Elle ajouta, je crois, une ou deux paroles que je n’entendis pas ; puis elle s’éloigna doucement comme une vision qui s’évanouit, et je ne la revis plus, ni ce soir-là ni le lendemain, ni jamais.

Je partis au lever du jour sans voir personne. J’évitai de traverser Paris, et je me fis conduire directement à la maison d’extrême banlieue qu’habitait Augustin. C’était un dimanche ; il était chez lui.

Au premier coup d’œil, il comprit qu’un malheur m’était arrivé. D’abord, il crut que Mme de Nièvres était morte, parce que, dans sa parfaite honnêteté d’homme et de mari, il n’imaginait pas de malheur plus grand. Quand je lui eus fait con-