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LES STRATAGÈMES. LIV. II.

libre accès auprès du général quand celui-ci ne dormait pas, se présenta au moment où, accablé de veilles et de travaux, il venait de céder au sommeil. Quoiqu’il insistât pour entrer, ayant, disait-il, à lui communiquer une affaire importante et pressée, les esclaves, attentifs à la santé de leur maître, lui refusèrent obstinément la porte. Alors, craignant que sa démarche n’éveillât les soupçons, il alla vers la porte du camp, où l’attendaient des chevaux tout prêts, et retourna vers Mithridate, sans avoir pu accomplir son dessein.

31. En Espagne, Sertorius, ayant établi son camp près de Lauron, en face de celui de Pompée, et voyant qu’on ne pouvait aller au fourrage dans deux cantons, l’un voisin, l’autre éloigné des camps, voulut que ses troupes légères fissent de continuelles incursions dans le premier, et que pas un homme armé ne parût dans l’autre, jusqu’à ce que l’ennemi fût convaincu que le lieu le plus éloigné était le plus sûr. Aussitôt que les soldats de Pompée y furent allés, Sertorius, pour tendre des embûches aux fourrageurs, y envoya Octavius Grécinus, avec dix cohortes armées à la romaine, dix mille hommes de troupes légères, et deux mille cavaliers commandés par Tarquitius Priscus. Ces chefs s’acquittèrent habilement de leur mission : car, après avoir reconnu les lieux, ils embusquèrent leurs troupes, pendant la nuit, dans une forêt voisine, ayant soin de placer en première ligne les Espagnols, soldats agiles, et excellents pour les coups de main ; plus avant dans la forêt, l’infanterie armée de boucliers, et plus loin encore la cavalerie, afin que le hennissement des chevaux ne trahît pas le piége. Ils reçurent tous l’ordre de rester en repos et de garder le silence jusqu’à la troisième heure du jour. Déjà les soldats de Pompée, en pleine sécurité et chargés de provisions, songeaient à s’en retourner, et ceux, qui avaient fait le guet, séduits par cette sûreté