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daire à un livre de Pierre d’Alva sur la Conception de la Vierge en 21. volumes, dont la premiere lettre A contient trois gros volumes in fol. imprimez à Madrit en 1648.

ABDICATION. s. f. Renonciation volontaire à une charge, à une magistrature. Il faut remarquer que l’abdication differe de la resignation, en ce que l’abdication se fait purement & simplement, au lieu que la resignation se fait en faveur d’une tierce personne.

On dit aussi, L’abdication d’un fils rebelle & desobeïssant. On dit aussi au Palais, Faire une abdication de biens, quand on en fait un abandonnement entier.

ABDIQUER. v. act. Renoncer à une magistrature, à une charge, s’en deffaire, l’abandonner. Il y a eu bien des Empereurs & des Rois qui ont abdiqué l’Empire, le Royaume. Ce mot vient du Latin abdicare, qui sign. la même chose.

On dit aussi en Droit, Abdiquer un fils, pour dire, l’abandonner, le chasser de sa maison, ne le vouloir plus reconnoître pour fils.

Abdiqué, ée. part. pass. & adj.

ABDOMEN. s. m. Terme de Medecine, qui sign. cette partie anterieure du bas ventre qui est depuis les cuisses en remontant jusqu’au diaphragme. Ce mot est Latin, & vient de abdo, parce qu’il cache les intestins. Les Grecs l’appellent epigastre, & les Arabes mirach.

ABDUCTEUR. adj. m. C’est une épithete que les Medecins donnent au quatriéme muscle des yeux qui les fait mouvoir en dehors, & regarder de côté pour marque de mespris & de desdain : c’est pourquoy on l’appelle aussi orgueilleux. On le dit aussi des muscles du pouce, & d’autres parties du corps qui se peuvent mouvoir en dehors. Ce mot vient du Latin abduco, qui signifie, Emmener, tirer en arriere.

ABE.

ABEILLE. subst. fem. Insecte volant, grosse mouche qui a un aiguillon fort picquant, & qui fait le miel & la cire. Swammerdam en fait la description, aussi bien que des bourdons appellez fuci, qui sont les masles. A l’égard des abeilles qui font le miel, qu’il appelle, apes operariae, il dit qu’on ne peut decouvrir si elles sont masles ou femelles : mais dans le Roy & les bourdons les parties qui servent à la generation sont tres perceptibles. Jean de Hoorn fameux Anatomiste a fait voir les œufs des abeilles dans la femelle, que l’on nomme ordinairement le Roy. Elles ont un tissu dont elles sont envelopées, qui est ourdy de même que celuy des vers à soye. Swammerdam montre aussi des rayons de miel où l’on voit les appartemens du Roy, de la Reine, & des autres abeilles : & l’aiguillon de celuy qu’on nomme Roy a trois doubles ; & il fait voir ses testicules avec sa verge. On y decouvre sensiblement les poulmons composez de deux petites vessies. Leur gouvernement ne consiste que dans un amour mutuel, sans qu’elles ayent la moindre superiorité les unes sur les autres. Les abeilles servent d’aliment aux hyrondelles, qui ont l’adresse de les prendre en volant. C’est pourquoy lors qu’il va pleuvoir, & qu’il y a peu de ces petits animaux dans l’air, elles descendent vers la terre pour y chercher leur aliment : d’où est venu l’erreur de croire qu’elles predisent la pluye. Il y a aussi des mouches d’eau qui portent les aiguillons dans la bouche, aussi bien que tous les autres insectes aquatiques. Aldrovandus les décrit sous le nom d’abeilles amphybies ; & Jonston les appelle abeilles sauvages. Il y a une espece d’abeilles sauvages qu’on trouve dans les jardins & dans les bois. Swammerdam en fait


voir de six sortes. Il y en a qui ont des cornes fort longues ; d’autres dont le corps est velu. Mouffet les appelle abeilles solitaires, dont le nid est fait de gravis de sable & d’argille. Il fait voir aussi sept sortes de guespes. Il y en a aussi de bastardes, qu’on appelle pseudosphecae. Hoeffnagel en a depeint de 24. sortes, entre lesquelles il y a une mouche à trois queües, en Latin vespa. Il y en a une que Goedart appelle gloutonne & devorante, que quelques-uns nomment muscalupus, parce qu’elle devore sa proye avec les dents.

Le Roy des abeilles est femelle, & jette environ six mille œufs par an. Il est deux fois plus gros que les autres abeilles. Il a les aîles courtes, ses jambes droites, & marche plus bravement que les autres. Il a une marque au front qui luy sert de diademe & de couronne. Quand les abeilles piquent, elles laissent l’aiguillon dans la playe, & se rompent les intestins ; ce qui cause leur mort. C’est le seul insecte né pour l’utilité de l’homme, à ce que dit Pline, liv. 11. En quoy il se trompe, car il devoit du moins ajoûter le vers à soye. Il raconte plusieurs merveilles des abeilles, aussi bien que Mathiole, touchant leur oeconomie, qui sont telles, que le Philosophe Aristomache employa 60. ans en leur contemplation. Quelques-uns croyent qu’on peut faire des abeilles par art. Lors qu’on tuë un bœuf en esté, & qu’on l’enferme dans une chambre basse bien close pour le laisser pourrir dans son cuir, ils prétendent qu’au bout de 45. jours il en sort une infinité d’abeilles. Ce mot vient du Latin apes ou apicula, parce qu’elle naist sans pieds, Nicod : ou de apicula, comme avette de apesta. Les principaux des Anciens qui ont parlé des abeilles, sont Aristote, Hyginus, Virgile, Celse, Marc Varron, &c.

Aboillage. s. f. Certain droit que des Seigneurs Chastelains ont de prendre les abeilles qui sont dans les forests dependantes de leurs Chastelenies. Ce mot vient de ce qu’on disoit autrefois aboille, pour abeille.

ABESTIR. v. act. Rendre un homme stupide & semblable à une beste à force de mauvais traittemens. Il a abesti son valet. son fils est tout abesti. Nabucodonosor fut abesti par un juste jugement de Dieu. les yvrognes s’abestissent par l’excez du vin. les afflictions, la solitude abestissent les gens.

Abesti, ie. part. & adject. Ce mot vient du Latin bestia.

ABH.

ABHORRER. v. act. Avoir en horreur, detester. Un tyran est un monstre que tout le monde abhorre, tout animal abhorre la mort. un Chrêtien doit abhorrer le blaspheme, & les autres vices. Ce mot vient d’horrere Latin, qui sign. Avoir le poil herissé de peur, être saisi & transi de froid.

ABJ.

ABJECTION. s. f. Condition servile qui fait tomber une personne dans le mépris. La fortune a reduit ce Gentilhomme dans une grande abjection, à se mettre dans des conditions serviles. Quelques-uns ont écrit abjection d’esprit, pour dire, Abattement d’esprit. Le merite des premiers Chrêtiens, des premiers Religieux, a esté de vivre dans l’abjection, dans l’humilité, dans le mépris des gens du monde. Ce mot vieillit.

Abjet, ette. adj. Méprisable, dont on ne tient point de conte. Il se dit sur tout de la naissance & de la profession. Une naissance abjette, un mestier abjet. un homme abjet. On le dit aussi de l’esprit, du courage. C’est un esprit vil & abjet, une ame basse & abjette, qui n’a aucune élevation, qui ne pense à rien de grand. Ce