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souvenirs d’une actrice.

J’avais une belle voix, un goût décidé pour la musique, et une organisation qui me faisait deviner ce que je ne pouvais guère apprendre à Metz. Tous les princes d’Allemagne avaient alors une musique à leur service. On voulut m’attacher à celle du prince régnant des Deux-Ponts. J’avais un oncle à cette cour, gouverneur du prince héréditaire et du prince Max[1], mais quoique née en Allemagne, je n’ai jamais pu apprendre un mot d’allemand ; ce n’était pas très commode pour vivre et causer avec eux.

Mon oncle était conseiller intime. C’est un titre

  1. Le prince Max, devenu roi de Bavière, était le souverain le meilleur et le plus populaire. Lorsqu’en 1821 je fus à Bade, pendant la saison des eaux, avec ma petite Nadèje, cette enfant excita, comme partout, un vif intérêt. Le roi de Bavière voulut la voir, et lorsqu’il apprit que j’étais la nièce de son ancien gouverneur, il m’envoya son chambellan pour me prier de venir au château avec mon intéressante élève. Il m’adressa les choses les plus obligeantes sur mon oncle, s’informant avec bienveillance de tout ce qui lui était arrivé « Je lui dois, dit-il au prince de Wissembourg qui se trouvait là, ce que je sais de mathématiques, mais il s’est souvent plaint de moi pour le reste. C’était un homme de mérite que votre oncle, madame, sévère ; mais bon. Je regrette qu’il n’ait pas vécu assez long-temps pour que j’aie pu lui prouver que ce jeune fou de prince Max faisait un grand cas de lui. Mais dans ce malheureux temps nous étions tous dispersés. »