Page:Fustel de Coulanges - La Cité antique, 1870.djvu/329

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sservir servir le débiteur. Mais il faut regarder de près à ce qu’un écrivain qui est si postérieur à cette époque, nous dit de ces dettes qui troublèrent la cité athénienne comme toutes les cités de la Grèce et de l’Italie. Il est difficile de croire qu’il y eût avant Solon une telle circulation d’argent qu’il dût y avoir beaucoup de prêteurs et d’emprunteurs. Ne jugeons pas ces temps-là d’après ceux qui ont suivi. Il y avait alors fort peu de commerce ; l’échange des créances était inconnu et les emprunts devaient être assez rares. Sur quel gage l’homme qui n’était propriétaire de rien, aurait-il emprunté ? Ce n’est guère l’usage, dans aucune société, de prêter aux pauvres. On dit à la vérité, sur la foi des traducteurs de Plutarque plutôt que de Plutarque lui-même, que l’emprunteur engageait sa terre. Mais en supposant que cette terre fût sa propriété, il n’aurait pas pu l’engager ; car le système des hypothèques n’était pas encore connu en ce temps-là et était en contradiction avec la nature du droit de propriété. Dans ces débiteurs dont Plutarque nous parle, il faut voir les anciens clients ; dans leurs dettes, la redevance annuelle qu’ils doivent payer aux anciens maîtres ; dans la servitude où ils tombent s’ils ne payent pas, l’ancienne clientèle qui les ressaisit.

Solon supprima peut-être la redevance, ou, plus probablement, en réduisit le chiffre à un taux tel que le rachat en devint facile ; il ajouta qu’à l’avenir le manque de payement ne ferait pas retomber le laboureur en servitude.

Il fit plus. Avant lui, ces anciens clients, devenus possesseurs du sol, ne pouvaient pas en devenir propriétaires : car sur leur champ se dressait toujours la borne sacrée et inviolable de l’ancien patron. Pour l’affranchissement de la terre et du cultivateur, il fallait que cette borne disparut. Solon la renversa : nous trouvons le témoignage de cette grande réforme dans quelques vers de Solon lui-même : « C’était une