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CHAP. IX GOUVERNEMENT DE LA CITÉ. 203

prêtre du prytanéo, les Grecs l'appelaient volontiers prytane ; quelquefois encore ils l'appelaient archonte. Sous ces noms divers, roi, prytane, archonte, nous devons voir, un personnage qui est surtout le chef du culte-, il entretient le foyer, il fait le sacrifice et prononce la prière, il préside aux repas religieux.

Il est visible que les anciens rois de l'Italie et de la Grèce étaient prêtres autant que rois. On lit dans Aristote : « Le soin des sacrifices publics de la cité appartient, suivant la coutume religieuse, non à des prêtres spéciaux, mais à ces hommes qui tiennent leur dignité du foyer, et que l'on appelle, ici rois, là prytanes, ailleurs archontes •.» Ainsi parle Aristote, l'homme qui a le mieux connu les constitutions des cités grecques. Ce passage si précis prouve d'abord que les trois mots roi, pry- tane, archonte, ont été longtemps synonymes; cela est si vrai qu'un ancien historien, Gharon de Larapsaque, écrivant un livre sur les rois de Lacédémone, l'intitula : ^rc/ionfes etpry" tanes des Lacédéinoniens*. Il prouve encore que le personnage que l'on appelait indifféremment de l'un de ces trois noms, peut-être de tous les trois à la fois, était le prêtre de la cité, et que le culte du foyer public était la source de sa dignité et de sa puissance.

Ce caractère sacerdotal de la royauté primitive est claire- ment indiqué par les écrivains anciens. Dans Eschyle, les filles de Danaiis s'adressent au roi d'Argos en ces termes : « Tu es le prytane suprême, et c'est toi qui veilles sur le foyer de ce pays*.» Dans Euripide, Oreste, meurtrier de sa mère, dit à Ménélas : o II est juste que» fils d'Agamemnon, je règne dans Argos; » et Ménélas lui répond : « Es-tu donc en mesure, toi meurtrier, de toucher les vases d'eau lustrale pour les sacri-

��1. Aristote, Politique, VI, 5, li (Didot, p. 600). — Denya d'Halic, II, 6& : t*

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2. Suidas, ▼» Xa^wv.

3. Eschyle, Suppliantes, J69 (357). On sait quel rapport étroit il y trait ciiei les anciens entre le théâtre et la religion. Une représentation théâtrale était une cérémonie du culte, et le poëte tragique deyait célébrer, en général, une des lé- gendes sacrées de la cité. De là vient que nous trouvons dans les tragiques tant d«  TJeillef traditions et même de vieUlea formes de langage.

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