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CBAP. X. ÉTABLISSEMENT DE LA DÉMOCRATIE. 385

commerce, l'instabilité des fortunes éTeilIa plus tôt Jes con- voitises ou les espérances des classes inférieures, et l'aristo- cratie fut plus tôt attaquée. **

Les riches de Rome résistèrent beaucoup mieux que ceux de la Grèce-, cela tient à des causes que nous dirons plus loin Mais, quand on lit l'histoire grecque, on remarque avec quel- que surprise combien l'aristocratie nouvelle se défendit faible- ment. Il est vrai qu'elle ne pouvait pas, comme les eupatrides. opposer à ses adversaires le grand et puissant argument de 1? tradition et de la piété. Elle ne pouvait pas appeler à son se- cours les ancêtres et les dieux. Elle n'avait pas de point d'ap- pui dans ses propres croyances ; elle^n'avait cas foi dans la légitimité de ses privilèges.

Elle avait bien la force des armes ; mais cette supériorité même finit par lui manquer. Les constitutions que les États se donnent dureraient sans doute plus longtemps, si chaque État pouvait demeurer dans l'isolement, ou si du moins il pouvait vivre toujours en paji. Mais la guerre dérange les rouages des constitutions et hâte les changements. Or, entre ces cités de la Grèce et de l'Italie l'état de guerre était pres- que perpétuel. C'était sur la classe riche que le service mili- taire pesait le plus lourdement, puisque c'était elle qui occu- pait le premier rang dans les batailles. Souvent, au retour d'une compagne, elle rentrait dans la ville, décimée et affai- blie, hors d'état par conséquent de tenir tête au parti popu- laire. A Tarente, par exemple, la haute classe ayant perdu la plus grande partie de ses membres dans une guerre contre les Japyges, la démocratie s'établit aussitôt dans la cité. Le même fait s'était produit à Argos, une trentaine d'années aupara- vant : à la suite d'une guerre malheureuse contre les Spartia- tes, le nombre des vrais citoyens était devenu si faible, qu'il avait fallu donnef le droit de cité à une foule de périèques '. C'est pour n'avoir pas à tomber dans cette extrémité que Sparte était si ménagère du sang des vrais Spartiates. Quant à Rome, ses guerres continuelles expliquent en grande partie

��I. AriatoU, Politiq\t4, Y, 3, 3.

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