Page:G. Scudéry - Arminius ou les Frères ennemis - 1644.djvu/30

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TRAGI-COMÉDIE.
Bref, il veut que je meure, et je cours au trépas.
EMILE.
Ne prenez point encore cette funeste voie ;
Puisqu’il est dans le camp, souffrez que je le vois ;
Madame, au nom des Dieux, accordez-moi ce bien ;
Suspendez vos projets, ne déterminez rien ;
Peut-être que l’ingrat changera de pensée ;
Il connait à quel point vous êtes offensée ;
Il connait que son crime, est sans comparaison ;
Et son cœur en secret, blâme sa trahison.
Souffrez donc que le mien vous rende ce service ;
Qui laisse la Vertu, peut bien quitter le vice ;
S’il sait que vous vivez, sa flamme revivra ;
Montrons-lui son devoir, pour voir s’il le suivra.
SEMIGIRE.
Ha, ne m’abuse point d’une vaine espérance !
Elle est sans fondement, comme sans apparence ;
Veux-tu changer le sort, et les décrets des Cieux,
Et crois-tu que ta voix, puisse plus que mes yeux ?
Non, non, c’est me flatter dans ma triste aventure ;
L’ingrat a méprisé l’Amour et la Nature ;
Il a trahi son frère, il m’a manqué de foi ;
Juge après ces erreurs, ce qu’il fera pour toi.
Cède, cède plutôt au Destin qui me brave ;
Emile, ne sois plus l’Esclave d’une Esclave ;