Page:Gaboriau - L’Affaire Lerouge.djvu/143

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blaient remplis d’une poussière fine. Ses cheveux dénoués tombaient le long de ses joues et sur ses épaules, contribuant à lui donner un aspect terrifiant. Elle poussait de temps à autre un gémissement inarticulé ou murmurait des paroles inintelligibles. Parfois, une douleur plus terrible que les autres lui arrachait un grand cri : — « Ah ! que je souffre ! » Elle ne reconnut pas Noël.

— Vous voyez, monsieur, fit la bonne.

— Oui, qui pouvait se douter que son mal marcherait avec cette rapidité ?… Vite, courez chez le docteur Hervé ; qu’il se lève et qu’il vienne tout de suite, dites bien que c’est pour moi.

Et il s’assit dans un fauteuil, en face de la malade.

Le docteur Hervé était un des amis de Noël, son ancien condisciple, son compagnon du quartier latin. L’histoire du docteur Hervé est celle de tous les jeunes gens qui, sans fortune, sans relations, sans protections, osent se lancer dans la plus difficile, la plus chanceuse des professions qui soient à Paris, où l’on voit, hélas ! de jeunes médecins de talent réduits, pour vivre, à se mettre à la solde d’infâmes marchands de drogues.

Homme vraiment remarquable, ayant conscience de sa valeur, Hervé, ses études terminées, s’était dit : Non, je n’irai pas végéter au fond d’une campagne, je resterai à Paris, j’y deviendrai célèbre, je se-