Page:Gaboriau - L’Affaire Lerouge.djvu/301

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Pour le coup, M. Daburon ne put dissimuler une très-sincère admiration.

— Voilà un beau désintéressement, monsieur, dit-il.

— Je pense, répondit Noël, qu’il n’est que raisonnable. Oui, au pis aller, je me déciderais à laisser mon titre à Albert. Certes le nom de Commarin est illustre, cependant j’espère que dans dix ans le mien sera plus connu. Seulement j’exigerais de larges compensations. Je n’ai rien, et souvent j’ai été entravé dans ma carrière par de misérables questions d’argent. Ce que madame Gerdy devait à la générosité de mon père a été presque entièrement dissipé. Mon éducation en a absorbé une grande partie, et il n’y a pas longtemps que mon cabinet couvre mes dépenses.

Nous vivons, madame Gerdy et moi, très-modestement ; par malheur, bien que simple dans ses goûts, elle manque d’économie et d’ordre, et jamais on ne s’imaginerait ce qui s’engloutissait dans notre ménage. Enfin, je n’ai rien à me reprocher : advienne que pourra. Sur le premier moment, je n’ai pas su dominer ma colère, mais maintenant je n’ai plus de rancune. En apprenant la mort de ma nourrice, j’ai jeté toutes mes espérances à la mer.

— Et vous avez eu tort, mon cher maître, prononça le juge. Maintenant, c’est moi qui vous le dis : espérez. Peut-être avant la fin de la journée serez-