Page:Gaboriau - L’Affaire Lerouge.djvu/459

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— Vous ne pouvez m’offenser, mademoiselle, reprit le magistrat, je vous l’ai dit, je vous appartiens.

— Alors, monsieur, aidez-moi à prouver que ce que j’avance est exact. Je vais tout vous conter.

M. Daburon était bien convaincu que Claire cherchait à surprendre sa bonne foi. Cependant son assurance l’étonnait.

Il se demandait quelle fable elle allait imaginer.

— Monsieur, commença Claire, vous savez quels obstacles a rencontrés mon mariage avec Albert. M. de Commarin ne voulait pas de moi pour fille parce que je suis pauvre, je n’ai rien. Il a fallu à Albert une lutte de cinq années pour triompher des résistances de son père. Deux fois le comte a cédé, deux fois il est revenu sur une parole qui lui avait été, disait-il, extorquée. Enfin, il y a un mois il a donné de son propre mouvement son consentement. Cependant ces hésitations, ces lenteurs, ces ruptures injurieuses, avaient profondément blessé ma grand’mère. Vous savez son caractère susceptible ; je dois reconnaître qu’en cette circonstance elle a eu raison. Bien que le jour du mariage fût fixé, la marquise déclara qu’elle ne me compromettrait, ni ne nous ridiculiserait davantage en paraissant se précipiter au-devant d’une alliance trop considérable pour qu’on