Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/313

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vous revoient plus ! le désert est désormais trop étroit pour nous deux. »

En disant ces mots, le Canadien fit jouer la batterie de sa carabine ; mais l’Indien, sans s’émouvoir, fit signe de la main.

« Rayon-Brûlant, s’écria-t-il en frappant fièrement sa poitrine, cherchait le long de la Rivière-Rouge l’Aigle des Montagnes-Neigeuses et l’Oiseau-Moqueur, en quête du fils que les chiens apaches leur ont enlevé.

– L’Aigle, le Moqueur ! s’écria Bois-Rosé au comble de la surprise. Ah ! c’est vrai, j’oubliais… Mais, dites, au nom du Grand-Esprit, dites, continua vivement le vieux chasseur, avez-vous vu mon Fabian, l’enfant que je cherche ?… »

Et le Canadien, rejetant tout à coup sa carabine loin de lui, se précipita dans le gué de la rivière, qu’il franchit à pas de géant.

« Oui ! oui ! l’Aigle et le Moqueur, c’est bien nous deux, c’est le nom que nous ont donné les Apaches, et que j’avais oublié, continuait le Canadien tandis que ses grandes enjambées faisaient jaillir l’eau autour de lui. Attendez, Rayon-Brûlant, attendez, je suis à vous, comme le fer est à la flèche, comme la lame est à la poignée… un ami… à la vie et à la mort… »

Le jeune Indien souriait en attendant le coureur des bois, qui atteignit bientôt la rive en lui tendant sa large et loyale main dans laquelle le guerrier sentit la sienne comme dans le tronc fendu d’un arbre qui se serait refermé sur elle.

« Ainsi, s’écria le Canadien, résistant à peine au désir d’enlever le jeune Indien dans ses bras, vous êtes l’ennemi de Main-Rouge, de Sang-Mêlé et de toute cette… Mais qui a dit nos noms au guerrier que les siens ont bien nommé le Rayon-Brûlant ? car mon fils paraît terrible comme les langues de feu qui sortent des nuages.

– Depuis le préside de Tubac jusqu’au Lac-aux-Bi-