Page:Gabriel Ferry - Les aventures d'un Français au pays de Caciques, 1881.djvu/43

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Nous n’avions pas marché dix minutes que, selon le renseignement du sereno, nous avions atteint un pont jeté sur un étroit canal. Des maisons crevassées baignaient leur pied verdâtre dans une eau grasse et bourbeuse. Une lampe, qui se consumait tristement devant un tableau des âmes du purgatoire, jetait des reflets livides sur cette eau stagnante. Sur les terrasses, des chiens de garde hurlaient à la lune, tantôt cachée, tantôt encadrée seulement dans un mobile rideau de nuages, car nous étions dans la saison des pluies. Sauf ces lugubres rumeurs, tout était silencieux là comme dans les autres quartiers que nous venions de traverser. Les fenêtres d’un premier étage, assez vivement éclairées en face du tableau des âmes du purgatoire, tranchaient seules sur cette double rangée de sombres masures. Perico frappa à la porte de la maison illuminée. On tarda quelque temps à venir enfin la porte s’ouvrit, mais à demi, un des vantaux étant retenu, selon l’usage, par une chaîne de fer.

— Qui est la ? dit une voix d’homme.

— Des amis qui viennent prier pour les morts et se réjouir avec les vivants, répondit Perico sans hésiter.

Nous entrâmes. Éclairés par la lanterne de celui qui remplissait les fonctions de portier, nous traversâmes le vestibule et pénétrâmes dans une cour