Page:Gagneur - Trois soeurs rivales.djvu/86

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lade entrevoit déjà les sphères, supérieures d’une autre existence.

Renée, la bonne et tendre Renée est à côté d’elle, et travaille silencieusement à une broderie. Une petite fille de trois ou quatre ans joue à ses pieds. Cette enfant paraît subir l’influence de la tristesse qui l’environne ; car elle modère ses mouvements et le son de sa voix. Gabrielle contemple sa fille avec une expression mêlée de tendresse et d’amertume, et des pleurs coulent le long de ses joues. Lorsque l’enfant vit ses larmes, elle s’élança vers sa mère en étendant ses petits bras.

— Ne pleure pas, maman, s’écria-t-elle, je te promets d’être toujours sage.

Les pleurs de Gabrielle redoublèrent ; elle pencha la tête et essaya de soulever les bras pour serrer sa fille sur son cœur. Puis il se fit soudain sur son visage comme un mouvement de répulsion ; elle se renversa en arrière et repoussa son enfant.

— Emmène-la, je t’en prie, dit-elle à Renée.

— Viens, mon enfant, fit Renée en se levant pour la faire sortir, maman veut dormir.

— Je ne ferai pas de bruit, je veux rester, supplia-t-elle en pleurant.

— Non, viens, mon bon petit ange, insista Renée qui la prit dans ses bras avec une tendresse toute maternelle.

La petite fille sortit en étouffant un gros sanglot.

Quand Renée revint auprès de Gabrielle, celle-ci dit, avec une voix entrecoupée de larmes :

— Tu lui serviras de mère, n’est-ce pas, ma Renée, et tu lui donneras toutes les caresses que je lui ai refusées ?

— Pourquoi les lui refuser ? répondit Renée ; les joies de la maternité t’auraient