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Page:Gagnon - Chansons populaires du Canada, 1880.djvu/342

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CHANSONS POPULAIRES

qu’ils sont, tu les aurais reçus incorporels, mais ton âme est jointe à un corps, et c’est par l’intermédiaire des objets sensibles qu’ils sont présentés à son intelligence. »

Nos chants populaires appartiennent le plus souvent, quant à l’échelle des sons, à la tonalité grégorienne. Les exemples de ce fait qu’on a pu voir dans ce volume ne sont pas des exemples isolés. On peut affirmer que les mélodies qui n’ont jamais pénétré dans les villes, — et elles sont extrêmement nombreuses, — appartiennent presque toujours à l’ordre diatonique, et que très-souvent elles sont même entièrement conformes aux lois modales du chant grégorien. Ce fait étant connu, un homme, qui, du reste, ne connaîtrait rien du Canada, pourrait dire avec certitude, de l’avis de M. Vincent, de M. d’Ortigue et de tous les théoriciens, que, du moins dans une certaine mesure (car il y aurait encore le rhythme à examiner), le peuple de nos campagnes canadiennes est un peuple à mœurs simples, honnête et religieux.[1]

On a pu voir que, dans un bon nombre de nos mélodies populaires, les modes grégoriens, avec leurs échelles spéciales, leurs notes à propriétés et affinités particulières, sont parfaitement accusés. Il est d’autres mélodies popu-

  1. “ Platon, ainsi que les philosophes les plus célèbres de la Chine, considérait la simplicité des mœurs et le calme des passions comme le fondement le plus solide du maintien de la constitution et de la tranquillité d’un royaume ou d’une république. Or, il est de certains systèmes de tonalité dans la musique qui ont un caractère calme et religieux, et qui donnent naissance à des mélodies douces et dépouillées de passion, comme il en est qui ont pour résultat nécessaire l’expression vive et passionnée. À l’audition de la musique d’un peuple, il est donc facile de juger de son état moral, de ses passions, de ses dispositions à un état tranquille ou révolutionnaire, et enfin de la pureté de ses mœurs ou de ses penchants à la mollesse. Quoi