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Page:Galopin - Le Docteur Oméga, 1906.djvu/23

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LE DOCTEUR OMÉGA

Cependant, quand vint le soir, mon obsession me reprit.

La conversation de la matinée me revint à l’esprit, et, de déductions en déductions, j’en arrivai à me demander si le docteur était réellement un aliéné.

Après tout, me disais-je, ses yeux n’ont rien d’inquiétant… Ils sont un peu durs, c’est vrai, mais cela tient sans doute à ce qu’ils sont d’un bleu très clair.

Ses gestes ne paraissent pas ceux d’un halluciné… les fous ont des mouvements saccadés, brusques, nerveux, et, ma foi ! le docteur Oméga est plutôt sobre de gestes. C’est sûrement un original… mais qui ne l’est pas ?

Ceux qui passent leur existence à chercher sans cesse ont bien le droit, après tout, d’être un peu singuliers d’allures…

Rien ne vous détache des choses extérieures comme la fièvre de l’invention.

Somme toute, les penseurs sont des êtres à part, au cerveau merveilleux, puissant, trop compliqué pour être compris des vagues individualités qui traitent d’utopie tout ce qui dépasse leur conception.

Ai-je vraiment le droit de considérer le docteur Oméga comme un fou avant d’avoir jugé son œuvre ? Si cet homme était un génie ?

L’heure du dîner arriva.

Je ne touchai pas aux plats qu’on me servit ; je me con-