Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 1.djvu/41

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tume de magnat, tout chamarré d’or, tout étoilé de diamants, tout brodé de perles, il passait parmi les groupes comme une apparition étincelante, excitant la jalousie des hommes et l’amour des femmes, que Prascovie lui rendait indifférentes. ― Nous n’ajoutons pas que le comte possédait les dons de l’esprit comme ceux du corps ; les fées bienveillantes l’avaient doué à son berceau, et la méchante sorcière qui gâte tout s’était montrée de bonne humeur ce jour-là.

Vous comprenez qu’avec un tel rival, Octave de Saville avait peu de chance, et qu’il faisait bien de se laisser tranquillement mourir sur les coussins de son divan, malgré l’espoir qu’essayait de lui remettre au cœur le fantastique docteur Balthazar Cherbonneau. ― Oublier Prascovie eût été le seul moyen, mais c’était là chose impossible ; la revoir, à quoi bon ? Octave sentait que la résolution de la jeune femme ne faiblirait jamais dans son implacabilité douce, dans sa froideur compatissante. Il avait peur que ses blessures non cicatrisées ne se rouvrissent et ne saignassent devant celle qui l’avait tué innocemment, et il ne voulait pas l’accuser, la douce meurtrière aimée !