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Plangon se leva, fut à lui, et, le serrant étroitement sur sa poitrine : « Ah ! j’ai été méchante, dure, impitoyable ; je t’ai fait souffrir, mon cher cœur. Je ne sais comment je me punirai de tant de cruautés. Tu aimais Bacchide, et tu avais raison, elle vaut mieux que moi. Ce qu’elle vient de faire, je n’aurais eu ni la force ni la générosité de le faire. C’est une grande âme, une grande âme dans un beau corps ! en effet, tu devais l’adorer ! » Et une légère rougeur, dernier éclair d’une jalousie qui s’éteignait, passa sur la figure de Plangon.

Dès ce jour, Ctésias, au comble de ses vœux, rentra en possession de ses privilèges et continua à vivre avec Plangon, au grand désappointement de tous les merveilleux Athéniens.

Plangon était charmante pour lui et semblait prendre à tache d’effacer jusqu’au souvenir de ses précédentes rigueurs. Elle ne parlait pas de Bacchide ; cependant elle avait l’air plus rêveur qu’à l’ordinaire et paraissait agiter dans sa cervelle un projet important.

Un matin, elle prit de petites tablettes de sycomore enduites d’une légère couche de cire, écrivit quelques lignes avec la pointe d’un stylet, appela un messager et lui remit les tablettes en lui disant de les porter le plus promptement possible à Samos, chez Bacchide l’hétaire.

À quelques jours de là, Bacchide reçut, des mains du fidèle messager qui avait fait diligence,