Page:Gautier - Chanson de Roland onzieme edition 1881.djvu/219

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CXLVII

Les félons Sarrasins frappent grands coups de lance
Sur ces écus, sur ces beaumes qui flamboient au soleil.
On n’entend que le bruit du fer et de l’acier ;
Les étincelles en volent jusqu’aux cieux.
Que de ruisseaux de sang et de cervelles !
Roland a grand deuil au cœur
De voir mourir tant de bons vassaux capitaines.
Alors il se souvient de la terre de France
Et de son oncle le bon roi Charlemagne ;
Et, qu’il le veuille ou non, ces pensées changent tout son cœur.Aoi.

CXLVIII

Il est entré dans la mêlée, le comte Roland,
El ne cesse d’y frapper de grands coups.
Dans sa main est Durendal, sa bonne épée qu’il a tirée du fourreau :
Il perce les hauberts, il brise les beaumes,
Il tranche les corps, les poings, les têtes,
Et jette à terre des centaines de païens
Qui tous se croyaient de bons vassaux.Aoi.

CXLIX

De l’autre côté est Olivier
Qui assaillit les païens et frappe de rudes coups !
Il tire du fourreau Hauteclaire, qu’il aime tant :
Fors Durendal, il n’en est pas de meilleure sous le ciel.
En son poing le Comte la tient, et vaillamment se bat.
Jusqu’aux bras il a du sang rouge :
" Dieu ! " s’écrie Roland, « que voilà un bon vassal !
" Eh ! noble comte, si loyal et si preux,
" Voici le jour où notre amitié prendra fin,
" Voici le jour de la douloureuse séparation.
" L’Empereur ne nous verra plus, -
" Et jamais il n’y aura eu si grande douleur en douce France.