Page:Gautier - Chanson de Roland onzieme edition 1881.djvu/77

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160Et y donne l’hospitalité aux dix messagers :
Douze sergents en prennent soin ;
Jusqu’au jour clair ils y passent la nuit...
L’Empereur se lève de grand matin.
Charles entend messe et matines ;
165Puis va s’asseoir sous un pin,
Et mande ses barons pour tenir son conseil :
Car il ne veut rien faire sans ceux de France.Aoi.


XII


L’Empereur va sous un pin,
Et mande ses barons pour tenir son conseil :
170C’est le duc Ogier et l’archevêque Turpin ;

12970-1804 ?). = Toute cette légende d’Ogier s’est formée EN MEME TEMPS que celle de Roland, et remonte par conséquent aux XIIIe-IXe siècles.=Ajoutons qu’Ogier n’est pas mis dans notre poème au rang des douze Pairs, mais qu’il reçoit cet honneur dans le Voyage à Jérusalem, Gui de Bourgogne, Renaus de Montauban, Fierabras, Otinel et l’Entrée en Espagne. = M. Barrois, éditeur du vieux poème que nous avons tout à l’heure analysé, prétend qu’Ogier était un Ardennais, et non pas un Danois. Cette opinion nous semble suffisamment réfutée par ces vers de la Chevalerie Ogier : Mult es quvers et plains de grant outrage. — Bien le dois estre : tu es de Danemarche... — AINC N’APARTINS DE FRANCE À NUL

BERNAGE (V. 1300 et suiv.).

  • Turpin. Il y a eu un véritable

archevêque de ce nom, lequel vécut sur siège de Reims, depuis 750 (ou 763, suivant la Gallia christiana) jusqu’en 811 ou 788 (ou 794, suivant la Gallia). Il a donc été réellement contemporain du grand désastre do Roncevaux, qui eut lieu en 778. Mais le Turpin de nos épopées présente des traits que l’histoire n’a point fournis. Il est né à Rome, si l’on en croit la Karlamagnus Saga (XIIIe siècle), ou en France, suivant la Chanson d’Aspremont (XIIIe siècle).

L’auteur de ce dernier poème ajoute que Turpin fut abbé do Jumièges avant d’être élevé au siège de Reims.-Quoi qu’il en soit, il est partout le type de l’évêque militaire. Dans Aspremont, on le voit porter au front de l’armée chrétienne le bois de la vraie croix, qui devient, entre ses mains, éblouissant comme le soleil. Dans Ogier (XIIe siècle), c’est lui qui livre à Charlemagne le Danois endormi ; mais il a pitié de cet illustre vaincu, et ne permet pas qu’il meure de faim dans sa prison. Après s’être couvert de gloire dans tous les combats que racontent l’Entrée en Espagne (XIIIe-XIVe siècle) et Gui de Bourgogne (XIIe siècle), l’archevêque-soldat meurt à Roncevaux (v. 2252). = La Chronique qui porte son nom se garde bien de le faire ainsi succomber dans la grande bataille, et le fait, survivre au désastre qu’il raconte. C’est lui qui, d’après ce singulier récit, célébrait la messe des morts auprès de Charles, lorsque l’Empereur vit passer dans le ciel les Anges qui emportaient l’âme de Roland. = Turpin est compté au nombre des douze Pairs par les Remaniements du Roland (XIIIe siècle), le Voyage à Jérusalem (XIIe siècle), la Karlamagnus Saga (XIIIe siècle), Otinel (XIIIe siècle), l’Entrée en Es-