Page:Gautier - Fleurs d’orient.djvu/289

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que j’étais tout son univers : il m’eût aimée laide et vieillie, il m’eût aimée, toujours. Pourtant, avant de céder, je voulus encore éprouver sa constance, car, hélas ! sa forme terrestre me cachait souvent son âme exquise, et si ma raison était charmée, mon cœur restait froid. Ah ! il n’est plus, l’ami fidèle ! Il a prouvé qu’il aimait, jusqu’à la mort, et, dans un irrémédiable désespoir, je fuis à jamais cette cour frivole ; j’expie, longuement, le crime inconnu de mon misérable cœur, dont je peux bien, aujourd’hui, avouer la honte ! Sache-le donc, Nari-Hira : au coffre de cèdre enfermant un trésor, j’ai préféré la charmante boîte d’or, qui n’était pleine que de parfums.

— Komati ! Komati ! s’écria le prince, tu m’as aimé ! tu m’aimes encore ! Ah ! reviens ! reviens ! et je n’aimerai que toi !

— Je mourrai vierge et solitaire, dit Komati en relevant la tête, je resterai fidèle à l’amant qui m’attendra au sortir de la vie. Il vient souvent me visiter, en rêve, me console et m’encourage. Il a ton âme adorable, ô Cho-Jo ! et