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LE THÉÂTRE TURC.

larges pantalons sales, sans cravate, n’ayant pour tout linge qu’une chemise de soie turque, refuse aux hammals de leur payer le prix convenu pour le transport du baril de raki. Ce refus forme le nœud de la pièce et devient la source d’une interminable cascade de calottes, de coups de pied, de coups de poing.

Le hammal maigre persiste avec une opiniâtreté de mulet exiger à son dû ; il se fait le génie malfaisant du cabaret ; il se plaint au chef des hammals, espèce de grotesque à barbe rousse, ayant un turban à côtes de melon de couleurs variées comme les tranches d’une glace plombière, un dolman rouge à la Bajazet, et agitant un bâton rembourré ; il va réveiller la police et le cadi qui paraît suivi de cinq ou six escogriffes affublés de costumes extravagants et de turbans en moules de pâtisserie, à enroulements prodigieux comme du temps des janissaires, enjolivés de plumeaux, d’ailes de cygnes, d’aigrettes de balai, et auxquels il ne manquait vraiment que les bougies allumées de la cérémonie du Bourgeois gentilhomme. On cite le négociant à