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L’ORIENT.

Les écrits des jésuites défrayent encore, après tant d’années, les récits des voyageurs confinés d’ordinaire dans quelques ports et réduits à observer la terre défendue, au moyen de télescopes, comme si c’était une planète ou un astéroïde.

La Chine, ouverte maintenant, s’est abritée bien des siècles derrière sa grande muraille ; elle restait pour l’Europe la chimérique patrie des dragons bleus, des poussahs dodelinant la tête et des miaos en porcelaine. Quant au Japon, il était inviolable et inviolé. À peine si les Hollandais avaient obtenu, à force de soumission flegmatique aux exigences les plus bizarres, d’y végéter dans la prison d’une factorerie sous la surveillance d’un incessant espionnage. Ce ne serait pas une exagération métaphorique de dire que la lune est mieux connue que le Japon, quoiqu’elle soit située à quatre-vingt-cinq mille lieues de nous. On en possède des cartes exactes et détaillées, l’altitude de ses montagnes est mesurée, on a sondé la profondeur de ses cratères, et l’on n’en est pas encore là avec