Page:Gautier - L’Orient, tome 1, Charpentier-Fasquelle, 1893.djvu/300

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
288
L’ORIENT.

qu’on nomme, nous ne savons trop pourquoi, la Ronde de nuit. On eût dit une reine de Saba naine. Le jongleur, après avoir ficelé sa toupie, la lançait en l’air et la rattrapait tournant toujours sur la paume de la main, au bout d’une pointe, la faisait promener sur le fil d’une lame de sabre et sur la tranche d’un éventail dont il dépliait lentement les feuilles. À chaque tour, la femme frappait avec des battoirs sur une légère table de laque faisant l’office de timbale, et les deux enfants poussaient des cris aigus. — Une construction assez compliquée en laque noire et rouge, représentant un kiosque, reliée à une pagode par un système de rainures, nous intriguait depuis le commencement de la séance. Une idole occupait le centre du kiosque, et nous ne comprenions pas trop à quoi cela pouvait servir ; nous le vîmes bientôt : c’était une sorte de dédale que la toupie devait parcourir sans encombre. Le jongleur la lança ; elle passa entre les jambes de l’idole, sortit du kiosque, gagna la pagode par l’étroit chemin, monta l’escalier en spirale et descen-