Page:Gautier - L’Orient, tome 1, Charpentier-Fasquelle, 1893.djvu/331

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
319
L’INDE.

même, mais seulement le modèle de Lahore. Si vous regardiez la ville véritable par le gros bout de la lorgnette, vous obtiendriez l’effet du plan ; en regardant le plan par le petit bout, vous le grandissez et vous obtenez un effet satisfaisant.

Lahore noue autour de ses reins une ceinture de tours et de fortifications en style moyen âge orientalisé ; des fossés, dont l’eau verte a des caïmans pour grenouilles, font comme une frange verte à sa robe rouge : car Lahore, comme Munich, est presque toute peinte avec ce rouge antique si cher au roi de Bavière. De ce fond sombre s’élancent, comme des mâts d’ivoire, les minarets des mosquées et les aiguilles fleuries des pagodes en albâtre ou en marbre. Dans les rues étroites fourmille un peuple innombrable, étrange et bariolé comme un rêve ; des formes que l’on croyait disparues avec le moyen âge revivent là dans une splendeur orientale. À chaque instant passent de longues cavalcades de cavaliers sykes, des caravanes de chameaux, des files de chariots do-