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L’ORIENT.

passants et de voyageurs. Aucune route de France, même aux abords d’une ville populeuse, n’est aussi fréquentée. Les Orientaux ne restent guère à la maison, et le moindre prétexte leur suffit pour se mettre en marche, d’autant plus qu’il n’y a pas à s’inquiéter, comme chez nous, de la température. Le baromètre est arrêté au beau fixe, et la pluie est un accident si rare, qu’on serait heureux d’être mouillé.

Rien de plus amusant, de plus varié et de plus instructif que cette procession de types qui vont à leurs affaires, et qui s’encadrent tour à tour dans le carreau du wagon comme dans un passe-partout dont on renouvellerait incessamment les gravures ou les aquarelles.

D’abord ce sont des chameaux qui s’avancent d’un air résigné et mélancolique, avec leur pas d’amble et leur balancement de col, animaux étranges, dont les formes gauches rappellent les essais des créations disparues. Sur la bosse du premier est juché, une jambe croisée sur l’autre, le conducteur en turban, aussi majestueux qu’Éliézer, ser-