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L’ORIENT.

maître Alcofribas Nasier. Une autre idole, sorte de bûche grossièrement ébauchée, à la fois risible et monstrueuse, a quitté le temple qu’elle habitait pour venir dans une cuisine faire l’office de billot. On hache des épinards sur la tête du fétiche auquel jadis on sacrifiait des victimes humaines. L’art n’a rien à regretter dans cet avilissement du dieu tombé.

La déesse Dourga, avec son collier de crânes, son corps peint en bleu, foulant aux pieds son époux Shiva, est passablement effroyable ; mais quelle charmante statuette que celle de ce jeune dieu indien presque beau comme un dieu grec, qui joue mélancoliquement de la flûte, une jambe repliée sur l’autre dans une pose de Faune antique ! Dans les vitrines on voit des figurines de terre cuite colorée, représentant les pénitences des Richis et des Mounis et la procession du char de Jaggernath, sous les roues duquel se précipitent et se font écraser les pèlerins fanatiques. Sur les étagères grimacent les dieux Poussahs de la Chine avec