Page:Gautier - L’Orient, tome 2, Charpentier-Fasquelle, 1893.djvu/384

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
374
L’ORIENT.

pêché de finir, et qui a été terminé avec un si fidèle bonheur par M. Abadie.

Un pareil guide était une bonne fortune pour un voyageur curieux comme nous, et nous usâmes avec toute l’indiscrétion possible de son inépuisable complaisance. Il connaissait la ville, non pas rue par rue, non pas maison par maison, mais pierre par pierre, pour l’avoir rebâtie tout entière en liége avec une exactitude à donner le vertige ; son travail ressemblait, pour la désespérante minutie, à ces prodigieuses besognes imposées par de méchantes fées, où il faut séparer grain à grain des boisseaux de millet et de chènevis brouillés ensemble. Il aurait pu vous dire : à tel endroit, il y a une tuile brisée, un chapiteau fruste, une plaque de crépi tombée. Constantine était pour lui comme Notre-Dame pour Quasimodo. Jamais assimilation ne fut plus complète.

Le soir, après avoir battu en tous sens les mille ruelles de la cité arabe, nous mangions le couscoussou, apprêté par les belles mains de son hôtesse kabyle, et Duclaux nous re-