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L’ORIENT.

battu serait, aux yeux de ces danseuses, le comble de l’indécence. À la fin, toute la troupe se mit de la partie, et nous remarquâmes parmi les autres une danseuse d’une beauté farouche et barbare, vêtue de haïks blancs et coiffée d’une sorte de chachia cerclée de cordelettes. Ses sourcils noirs rejoints avec du surmeh à la racine du nez, sa bouche rouge comme un piment au milieu de sa face pâle, lui donnaient une physionomie à la fois terrible et charmante ; mais l’attraction principale de la soirée était la séance des aïssaouas ou disciples d’Aïssa, à qui leur maître a légué le singulier privilége de dévorer impunément tout ce qu’on leur présente.

Nous les avions vus autrefois dans un douair aux environs de Blidah, et ce sabbat nocturne nous a laissé des souvenirs encore tout frissonnants. Les aïssaouas de l’Exposition universelle, après s’être excités par la musique, la vapeur des parfums et ce balancement de bête fauve qui agite comme une crinière leur immense chevelure, ont mordu