Page:Gautier - L’Usurpateur, tome 2.djvu/122

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

longs cils faisaient une ombre sur tes joues. Je te vois encore en fermant les yeux. Un paon blanc était brodé sur ta robe ; des lotus ornaient tes cheveux ; ta main pendante agitait distraitement un éventail en plumes de faisan. Ce ne fut qu’un éclair : tu disparus ; mais désormais tu étais toute ma vie… Je ne revins au palais qu’un an plus tard.

— C’est alors que je te vis pour la première fois, dit la reine. Tout le monde parlait de toi : mes femmes ne tarissaient pas ; ton éloge était dans toutes les bouches. J’eus la curiosité de voir ce héros à qui l’on accordait toutes les vertus, que l’on parait de toutes les grâces. Cachée derrière un store, je te regardai lorsque tu traversas la grande cour du daïri. Je trouvai que les louanges étaient au-dessous de la vérité, et je m’éloignai singulièrement troublée.

— Moi je quittai le palais sans t’avoir revue ; j’étais la proie d’une tristesse morne ; pendant un an, j’avais attendu impatiemment cet instant où j’espérais t’apercevoir encore, et cette année d’attente aboutissait à une déception. Je ne pus m’empêcher de revenir quelques jours plus tard ; cette fois je fus admis à une fête à laquelle tu assistais. C’est à cette fête que je m’aperçus de l’intérêt que me portait Fatkoura et que je formai le projet coupable de cacher derrière un amour