Page:Gautier - L’Usurpateur, tome 2.djvu/52

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Un combat était imminent. Cependant c’était Yoké-Moura, cette fois, qui refusait de sortir de la ville et de livrer bataille.

Il ne quittait même plus l’intérieur de la forteresse ; on le voyait s’y promener jour et nuit, agité, inquiet, paraissant chercher quelque chose. La nuit surtout, accompagné seulement de son fils Daïské, qui n’avait que seize ans, il errait sans relâche le long de la première muraille.

Les sentinelles, qui le voyaient passer et repasser avec son fils portant une lanterne, ne comprenaient rien à sa conduite et croyaient que le général était devenu fou.

Par instant Yoké-Moura se précipitait à genoux et collait son oreille à terre.

Daïské retenait son souffle.

Une fois, le général se releva vivement, tout ému.

— Est-ce mon sang qui bourdonne à mes oreilles ? dit-il ; j’ai cru entendre quelque chose. Écoute, mon fils, et vois si je ne me suis pas trompé.

L’enfant s’agenouilla à son tour et posa son oreille contre la terre.

— Mon père, dit-il, j’entends distinctement des coups lointains, sourds, réguliers.

Le général écouta de nouveau.

— Oui, oui, dit-il, je les entends très-bien aussi ; ce sont des coups de pioche contre la