Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/278

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traîne, est tout couvert de fleurs brodées, et les corolles ont pour rosée des diamants, des opales, des perles et des émeraudes.

Douze hérauts, agitant des étendards de drap d’or, crient, d’instant en instant, d’une seule voix, qui semble formidable :

« Prosternez-vous, esclaves ! Voici le Roi des Rois, la Lumière du Monde, le Pôle du Temps ; le très magnanime seigneur Sadoula, Bâhâdour, Mouzaffer-Cingh, fils bien-aimé de Nizam-el-Molouk, gardien de la loi sacrée, roi de l’immense Dekan, ayant sous ses sandales trente-cinq millions de sujets. C’est lui, l’Invincible, le Victorieux, le Glaive Formidable ! Réjouissez-vous, peuples ; remerciez Allah qui vous permet de glorifier un successeur de son prophète, et prosternez-vous dans la poussière, car voici le Roi des Rois, le tout-puissant prince Sadoula, Bâhâdour, Mouzaffer-Cingh ! »

Et en effet, derrière la haie immobile des soldats français, la foule se jetait à genoux et touchait le sol du front.

De jeunes pages, vêtus de cette charmante étoffe appelée murgala, chatoyante comme le cou des paons, couraient, en tenant les cordons d’or de l’éléphant royal.

À droite, sur des chevaux tous semblables, marchaient une troupe d’archers, dont les arcs figuraient un serpent tordu, et, à gauche, des frondeurs armés de frondes de Schiraz.

Les timbales royales, géantes, magnifiquement drapées, arrondissaient leurs demi-globes sur les flancs