Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/316

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blanc, si gigantesque et si majestueusement superbe que Bussy ne put retenir un cri d’admiration.

Le style noble et les proportions exquises de ce palais lui donnaient un charme inexprimable. Trois étages de galeries se superposaient, creusant des ombres douces dans la blancheur onctueuse du marbre, et elles étaient formées de colonnes et de colonnettes de plus en plus légères à mesure qu’elles s’élevaient ; des dômes, des tours octogones, des flèches, des clochetons gracieux dominaient l’édifice ; le tout sculpté, fouillé, ajouré comme des dentelles.

La porte, ogivale, plus haute qu’un arc de triomphe, avait sa façade revêtue d’émaux couleur de turquoise, traversés de fleurs et de lettres d’or, et l’intérieur de la voûte pavé de faïences des nuances les plus délicates. Au-dessus de la corniche se déployaient les plis frangés d’or du drapeau de la France caressant le blason de Bussy sculpté sous la couronne de marquis. Il portait d’argent, à une fasce de gueules, chargée de trois boucles d’or à l’antique, l’ardillon posé en pal.

Le canon tonna au moment où Bussy franchissait l’ogive, et le hadjib, qui l’avait devancé, le reçut au seuil de la cour, le front incliné, les bras croisés sur la poitrine.

— Soutien du Monde, qu’Allah te couvre de ses grâces ! dit-il, sois le bienvenu dans ton palais.

— Voilà un cadeau vraiment royal ! s’écria Kerjean, qui le nez levé, tournant la tête de tous côtés, ne se lassait pas d’admirer. Je crois que c’est la résidence même du Grand Mogol, Aureng-Zeb ; mais on la disait