Page:Gautier - La sœur du soleil.djvu/398

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mille hommes qu’il me reste, et les dix mille volontaires que tu as rassemblés : on peut entreprendre la lutte.

— Rentreras-tu dans la ville ? demanda le siogoun.

— Il vaut mieux, je pense, que je garde ma position avancée sur la colline. Au moment où l’armée s’ébranlera, j’attaquerai sur un autre point, afin qu’il soit contraint de diviser ses forces.

On rassembla les chefs afin de se concerter avec eux. La gravité de la situation faisait taire les discordes qui les divisaient d’ordinaire : tous se soumettaient à Yoké-Moura.

— L’ennemi s’est étendu tout autour de la ville, dit le général, de sorte que sur le point que vous attaquerez, vous rencontrerez des forces tout au plus égales aux vôtres. La sortie devra s’opérer du côté du sud, afin que, si c’est possible, vous acculiez l’ennemi à la mer. Que les chefs enflamment les soldats par leur exemple, par leurs paroles, et nous pouvons en triompher.

— C’est moi-même qui me mettrai à la tête de l’armée, s’écria Fidé-Yori. On tirera de leurs fourreaux de velours les insignes qui précédaient mon illustre père dans les combats, les courges dorées emmanchées à une hampe rouge, qui ont toujours été, partout où elles apparurent, un signal de victoire ; ce souvenir de Taïko-Sama enthousiasmera les soldats ; il leur rappellera les triomphes anciens, les batailles glorieuses remportées à son ombre. Ce talisman nous protégera et remplira d’effroi le parjure Hiéyas, en évoquant devant ses yeux l’image de celui dont il a trahi la confiance.

Les chefs retournèrent vers leurs soldats, afin de les préparer à la bataille décisive du lendemain. Fidé-Yori, lui, courut vers sa fiancée.