Page:Gautier - Le Roman de la momie, Fasquelle, 1899.djvu/105

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terminées en têtes d’Hâthor, nouées au col de longs bouts d’étoffe et jouant sur des pieux échancrés, Au mât dressé palpitait, car le vent d’est venait de se lever, une voile oblongue fixée à deux vergues, dont la riche étoffe était brodée et peinte de losanges, de chevrons, de quadrilles, d’oiseaux, d’animaux chimériques aux couleurs éclatantes ; à la vergue inférieure pendait une frange de grosses houppes.

L’amarre dénouée et la voile tournée au vent, la cange s’éloigna de la rive, divisant de sa proue les agrégations de barques dont les rames s’enchevêtraient et s’agitaient comme des pattes de scarabées retournés sur le dos ; elle filait insouciamment au milieu d’un concert d’injures et de cris ; sa force supérieure lui permettait de dédaigner des chocs qui eussent coulé bas des embarcations plus frêles. D’ailleurs les matelots de Tahoser étaient si habiles que la cange qu’ils dirigeaient semblait douée d’intelligence, tant elle obéissait avec promptitude au gouvernail et se détournait à propos des obstacles sérieux. Elle eut bientôt laissé derrière elle les bateaux appesantis, dont le naos plein de passagers à l’intérieur était encore chargé sur le toit de trois ou quatre rangées d’hommes, de femmes et d’en-