Page:Gautier - Les Deux Etoiles.djvu/232

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

être conservé son énergie, se troubla, pâlit, et fut presque sur le point de se trouver mal.

Le héros s’avança vers elle et lui dit d’une voix grave et douce, comme un Olympien qui parlerait à un mortel :

— Madame, rassurez-vous ; et, remarquant le bouquet de violettes qu’elle tenait à la main : Il y a longtemps que je n’en ai vu de si fraîches.

Par un mouvement machinal, Edith s’inclina et les lui tendit.

— Elles sentent bon, mais moins bon que celles de France, dit le César en rendant les fleurs à la jeune femme après les avoir respirées.

Puis il salua avec une noblesse majestueuse reprit sa route.

Éblouie de cette vision impériale, Edith revint à la maison de campagne ; et à l’interrogation de Benedict, elle répondit :

— Enfin, je l’ai vu.

— Qu’a-t-il dit ? Répétez-le syllabe pour syllabe.

— Il a dit que ces violettes sentaient bon, mais sentaient moins bon que celles de France. Voilà tout.

Benedict pâlit un peu, tant l’émotion que cette phrase si simple lui causa était grande.

Sans faire d’observation, il prit une lunette d’approche, une hache et se dirigea vers la roche où l’arbre désigné par sir Arthur Sidney tordait sa silhouette bizarre.

Il regarda avec sa lunette.

Un petit point blanc imperceptible, — était-ce une mouette ou un flocon d’écume ? — piquait seul l’immensité bleue de l’Océan.