Page:Gautier - Les Deux Etoiles.djvu/61

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d’eaux vives, jointes à la pureté de la race, amènent souvent la beauté anglaise à une perfection inimaginable. Le marbre vivant dans lequel sont sculptés ces beaux corps n’a de rival dans aucun pays du monde, pour l’éclat, la finesse et la transparence du grain. Les carrières de Paros et de Pentélique humains se trouvent dans l’antique Albion, ainsi nommée plutôt à cause de ses femmes que de ses falaises.

Amabel était la plus blanche fille de ce nid de cygnes arrêté au milieu de l’Océan.

Deux fins sourcils noirs rejoignaient leurs arcs à la racine d’un nez qu’une légère inflexion aquiline rendait plus noble que le nez grec, sans lui ôter de sa correction, et couronnaient des yeux aux prunelles d’un brun intense et chaud nageant sur un cristallin d’une limpidité bleuâtre ; une bouche d’une pourpre vive éclatait comme un œillet rouge au milieu de cette pâleur qu’elle rendait plus sensible et plus frappante.

Le long des belles joues d’Amabel se déroulaient deux molles spirales de cheveux soyeux et lustrés dont elle corrigea le tour du bout du doigt. Pour donner à sa toilette ce perfectionnement, elle mit en évidence une main d’une forme charmante, étroite, un peu longue, aux doigts effilés terminés par des ongles polis, brillants comme le jade, et d’une pureté aristocratique irréprochable. De telles mains, le désespoir des duchesses de la finance, ne s’obtiennent que par des siècles de vie élégante et se transmettent comme les diamants, de génération eu génération.

Apparemment Amabel se trouva bien, car un lé-